Le lendemain de ma 4e séance, j'ai passé ma journée à lui écrire. A organiser ma pensée. A vider mon sac. Ça a donné une lettre de 3 pages bordélique et démente.
Et sincère.
En d'autres termes, c'était très "moi".
Même si, comme dirait Copine#1, c'est pas comme ça que je démontrerai mon absence de maladie mentale.
Pendant l'écriture, je me suis sentie bien. Mais genre BIEN.
Je me libérais au fur et à mesure.
Et je me sentais tellement bieeeen !
Et je me sentais tellement bieeeen !
Révélation : ce qui m'empoisonnait, c'était ce que je ne disais pas.
Mais à ce point ?! Il faut croire que j'ai vraiment un souci avec les non-dits et les mensonges.
Mais à ce point ?! Il faut croire que j'ai vraiment un souci avec les non-dits et les mensonges.
Bon, bien sûr, toute cette lettre hurle à plein poumons "J'ai fait un transfert !", et si je n'ai jamais employé exactement le terme, ces trois pages en sont une définition assez claire - entrecoupée de parenthèses, de digressions et de réflexions capillaires.
Une fois que la lettre était écrite, je lui ai envoyé un texto pour avoir son adresse mail, et j'ai envoyé tout ça.
Libération.
Je suis convaincue : ça va beaucoup mieux. Je ne retournerai pas le voir. L'histoire de l'Ostéo, c'est bon, c'est fini. J'avais besoin d'une clôture, et c'est chose faite.
J’avais juste besoin de trouver comment.
**********
De : Mademoiselle B.
Envoyé : Mar 02/04/2019 19:06
Objet : (Aucun objet)
Objet : (Aucun objet)
Je déteste les introductions, je n’y arrive
pas, ça fait des plombes que je me demande comment démarrer ce message (alors que le reste est écrit).
(Donc voilà, visiblement mon choix est de commencer
en râlant).
Tout
ça pour dire que je souhaiterai (essayer
de) répondre ici à votre question au sujet de ce qui a pu être à
l’origine de ce mal être à la suite de l’avant-dernière séance.
Je
pense que je ressens actuellement un
état de solitude assez exacerbé que je ne m‘explique pas tout
à fait (car je suis plutôt bien
entourée et j’ai les meilleur ami(e)s du monde).
Je suppose que
je vis le constat de mon célibat (à
presque 32 ans, ce
que je n’imaginais pas spécialement lorsque
j’envisageais, plus jeune, ma vie d’adulte) comme une
situation d’échec personnel,
que je vis tantôt comme quelque chose que j’ai provoqué malgré moi,
tantôt comme quelque chose que je mérite (l’un et l’autre n'étant pas un
état d'esprit très folichon je le conçois), et je développe finalement
la croyance que je ne peux pas être aimé de
qui que ce soit (Ceci
étant également une petite voix insidieuse et perverse dans
ma tête, la voix
de différentes personnes qui m’ont
dit peu ou prou ce genre de choses tout au long de ma vie, et notamment lorsque j’étais en pleine construction –j’ai trop bien
intégré cela, la faute au fait
que j’ai tendance à croire les gens et à me remettre sans cesse en question pour le pire,
et j’en prend
seulement conscience)
(Il
y a trop de parenthèses dans ce paragraphe, c’est vraiment n’importe quoi. Bon, on va
faire comme si ce n'était pas mon boulot dans la vraie vie, d'aimer les trucs bien écrits).
Ceci
étant posé, je me retrouve donc, aujourd’hui
(enfin, il y a quelques semaines),
en plein doutes et
dans une situation
de vulnérabilité (liée sans doute à la prise de conscience dont
je parlais précédemment), à me
retrouver face à une personne (a.k.a vous)
bienveillante,
à l’écoute, a
priori sans jugement,
tout ça faisant alors écho à ce que j’aimerais idéalement avoir dans ma
vie. C’est une chose qui me manque, mais en réalité j’avais oublié que
ça me manquait. J’étais dans une situation où j’avais éteint mes
émotions, où je me focalisais sur moi-même et sur,
justement, les vulnérabilités que je mettais à jour régulièrement, et
qui me faisais dire que de toute façon, je n’étais pas du tout prête à
rencontrer qui que ce soit, et que la stabilité de mes amitiés actuelles
était tout ce dont j’avais besoin. Comme j’avais
éteint mes émotions, c’était... presque facile. Ou reposant.
Et
donc je me suis retrouvée chez vous, à, soudain,
trouver quelqu'un extrêmement séduisant, non pas seulement
physiquement, mais vis-à-vis d’un tout. Certes, je trouve votre sourire
absolument craquant, et j’ai une très grande affection pour le bordel
vaguement organisé qui vous tient lieu de chevelure et
qui me donne une irrépressible envie d’y mettre les mains. Mais ça ne
serait que détail s’il n’y avait votre personnalité pour animer tout
cela. Votre humour et vos traits d’esprits me ravissent, et j’aime
beaucoup que vous preniez toujours le temps de réfléchir
à ce que vous dites, et à chercher à ce que vos paroles soient
précises. J’aime votre voix, et le son un
peu aiguë que vous faite lorsque vous gloussez – je trouve d’ailleurs ce son absolument
adorable. Dans l’ensemble, vous regarder rire m’émerveille, et me donne envie de sourire à mon tour.
Je
tombe assez souvent en affection, en amour,
je tombe amoureuse, peu importe le terme employé. Je l’ai déjà évoqué
une fois, je suis une personne qui ressent, qui aime très fort, c’est
normal, c’est habituel, et ça peut être envers potentiellement tout le
monde, hommes, femmes, jeunes, vieux, car j’aime
des personnes ou des personnalités, et je n’ai jamais compris pourquoi
les gens se disent hétérosexuels ou homosexuels ; pour moi aimer
quelqu’un, ça a toujours été simplement.... Aimer quelqu’un. Le genre ou
l’âge ne devrait pas être un critère. Toutefois,
par rapport à cette dernière phrase, je tiens toutefois à préciser que
je ne parle pas forcément de désir sexuel, qu‘il soit bien précisé ici
que je n’ai aucun désir sexuel pour des enfants, merci de ne pas
m’envoyer le GIGN ou tout autre groupe d’intervention
à la délicatesse toute militaire pour défoncer ma porte et me coller la
tronche sur le parquet pour une arrestation musclée (pour peu que
j’essaie d’en tripoter un ou deux pour vérifier s’ils sont aussi musclés
qu’ils en ont l’air, et je me retrouverais en
plus avec un bras pété, non merci). D’autant plus que j’ai déjà dit que
je n’aimais pas les enfants, que je considère comme d’horribles petits
animaux sans empathie. (Mais sinon un jour, j’aimerais être maman).
Bref,
pour en revenir à vous et laisser de côté
l’idée désagréable de finir en prison pour pédophilie et outrage à
agent (même si j’ai fait mon stage de fin d’études à la prison de *** il y a quelques années, et que ce n'était pas si dégueu,
surtout du côté du Quartier des femmes), l’attirance
aurait sans doute été sans conséquence à un autre moment. Mais à ce
moment, le fait que je vous ai trouvé très séduisant, et que vous ayez
une attitude bienveillante, à l’écoute, bref, que vous vous intéressez à
moi (parce que c’est votre métier.. Et
que, pragmatiquement vous êtes payés pour ça), ça a fait écho à quelque
chose que j’aurais aimé avoir dans ma vie... Et je me suis aperçue que
ça me manquait cruellement.
Je crois que, plus simplement, vous
m’avez donné envie d’aimer à nouveau (je vous en ai voulu pour ça), et
ça a réactivé le fait que je n’avais personne dans ma vie depuis des
années.
Et puis que les
aventures que j’ai pu avoir ont rarement été avec des personnes bienveillantes. Et
puis j’ai comparé ma vie avec celle des autres. Et puis j’ai développé d’autres mécanismes d’auto-sabotage. Bref j’ai sombré.
Je
ne suis pas en train de dire que je mélange
le praticien et la personne (d’ailleurs en ce qui me concerne, je parle
de ce que je vois, et de ce que je ressens, vis-à-vis de Monsieur [son nom]-Ostéopate,
et j’ignore qui est [Son prénom], le type qui n’est pas seulement ostéopathe,
et qui est, allez savoir, peut-être un sale con, je n’en sais rien, à
vous de voir avec lui, même si parfois je me demande où commence l’homme
et où s’arrête le praticien), et j’espère
que je m’explique assez clairement (même si j’ai l’impression de ne pas
être claire du tout) (mais aussi cette manie de mettre des parenthèses
partout, ça n’aide en rien, c’est insupportable)
Tout
ça pour dire, fort laborieusement, que
cet écho a “réveillé” ma solitude, et tous les trucs rattachés à ça, et
que je suis tout à fait consciente de votre inaccessibilité (le but ici
n’étant pas de vous faire une proposition indécente, je sais que vous
êtes un homme marié) (de toute façon je n’aurais
jamais cette prétention au vu, entre autre, des dessous que vous avez
été contraint de voir pendant les séances - clairement, je ne serais
jamais une femme fatale) (je suis sérieuse : je ne suis absolument pas
là pour vous demander quoi que ce soit, je ne
fais que vous balancer des informations que je ne veux pas garder pour
moi parce que ça m’encombre)
Ce n’est pas votre faute, et ce n’est pas réellement
lié à vous, finalement – car vous faites seulement votre métier, et vous êtes... Juste vous.
Et en fait, il n’y a rien de grave là-dedans.
Je
crois que j’ai eu honte d’en parler. Peut-être
aussi que je ne savais pas comment aborder les choses (quand on voit
comme je patauge, alors que c’est par écrit, effectivement, valait mieux
que je ne me lance pas sans filet). Mais ça m’a énervée de ne pas y
arriver, j’ai trouvé ça malhonnête de ma part
(j’ai un rapport à la vérité un peu psychorigide,
le mensonge me rend cinglé).
Et j’ai trouvé ça de toute façon stupide d’avoir honte de ressentir ce
que je ressens – je crois qu’il n’y a rien de mal à ressentir des
choses. Même
si c'est parfois épuisant.
Vous avez dit une fois “On se ressemble beaucoup,
vous et moi, vous ne trouvez pas ?”. Ce jour-là, j’aurais aimé répondre “Oui, on devrait être amis !”.
Mais pour une raison qui m’exaspère au plus
haut point, toute ma répartie s’envole en votre présence. C’est affreusement agaçant. Même si une partie de moi adore cet
agacement.
Je vous trouve drôle et gentil, et comme je
le disais, ça s’arrête bien sûr à la limite de ce que vous montrez professionnellement, mais ça me semble pas inutile
de le dire. J’ai passé des moments très agréable en votre compagnie,
c’était intéressant et amusant. J’étais généralement assez contente de
venir, et au moins il y avait une contrepartie à tous ces trucs que vous
faites craquer pendant les séances, et qui
me terrorisent.
C’est dommage, j’aurais bien aimé vous rencontrer
dans d’autres circonstances, ou dans un cadre différent.
Je
pense que la séance d’hier a démontré que
l’ostéopathie n’est pas ma solution – si ça ne traite que les
conséquences, et non les causes, alors je dois chercher encore. Je
doute, de fait, qu’il soit utile que je revienne vous voir : ça ne fera
que me soulager quelques temps, mais il restera un problème
de fond.
Je
vous balance donc tout ça en guise de cadeau,
c’est peut-être un peu empoisonné (au vu du nombre de parenthèses, et
de l’absence de structure et d’organisation). Je ne sais pas si c’est
égoïste, ça l’est peut-être un peu, je sors ce qui m’encombre et ce qui
est trop lourd pour moi et je vous le laisse,
“Ca ne
m’appartient plus” pour reprendre des termes que vous pourriez utiliser, et que je trouve plutôt bien trouvés.
Ca n’a
foutrement rien à voir avec la choucroute vegan,
mais je crois ne jamais vous avoir
dit comment j’ai commencé à faire de la boxe. (L’histoire devrait vous
plaire, et puis ça nourrira le mythe). C’était le 14/02/2018, je me suis
demandée si j’allais passer ma soirée de Saint Valentin à pleurer et/ou
picoler et/ou faire des conneries (Il y
a quelques années, j’avais sifflé une bouteille de vodka et il m’avait
semblé judicieux d’envoyer des colis à destination de plusieurs
personnes, avec des cadeaux et des déclarations enflammées. C’était très
gênant dans l'ensemble, et accessoirement ça a été
ma pire gueule de bois).
J’ai finalement décidé que j’allais aller passer
la Saint Valentin dans une salle de boxe, et qu’avec un peu de chance, je pourrais même taper sur des mecs.
Ce que j’ai fait.
Je
n’aurais pas cru que ça me plairait autant
(dans ma tête, c'était pour la soirée). Mais je suis rentrée plus
détendue que jamais, vidée, à me dire “Je me sens super bien. Je me
sens... Je me sens.... Bordel c’est quoi le mot... c’est un mot en
“g”... Putain, c’est “galvanisé”, le mot que je cherche.
C’est ça, je me sens galvanisé !”.
Alors
j’y suis retournée. Outre l’opportunité
appréciable de pouvoir taper en toute impunité sur des mecs, j’aime y
voir une métaphore assez réconfortante de la vie, à savoir qu’on se
prend des coups, mais que le tout est de savoir se relever et les
rendre. (Je n’ai juste pas encore accepté que savoir
rendre les coups n’empêche pas de souffrir).
Sur
ce, j’espère que je n’ai pas dépassée les
bornes avec ce message, et que, d’une manière ou d’une autre, ça n’a
pas été désobligeant pour vous. Si ça l’a été, j’en suis vraiment et
sincèrement désolée. La dernière chose que je souhaite est d’être
blessante.
Ne vous sentez surtout pas obligé de me répondre.
Je ne le souhaite d’ailleurs pas spécialement, ce n’est pas du tout mon but, même si c’est peut-être un peu lâche de ma part.
Passez de bonnes vacances quoiqu’il en soit,
et bonne continuation.
Et puis d'une manière ou d'une autre... Merci ! :)
Mademoiselle B.
Tes histoires me passionnent, je te trouve poignante, très entière, un peu comme moi.Et puis on se ressemble aussi sur des douleurs inexpliquées. Je cherche aussi.
RépondreSupprimerJe te souhaite l'apaisement en tout cas.
Dounia
Merci pour ce commentaire qui me touche énormément. J'ai aussi remarquée que tu étais très sensible... Et c'est toujours rassurant de voir qu'on n'est pas toute seule à souffrir de trop ressentir :)
SupprimerPeut-être qu'il a raison, l'ostéo, et que les douleurs sont liées à autres choses. En tout cas, depuis que j'ai décidé de ne plus avoir recourt à lui, je garde ça sous controle.
En effet, je crois que "l'apaisement" est le meilleur souhait que l'on puisse faire. Je te le souhaite également <3