*FLASHBACK*
Nous sommes environ un an et demi plus tôt, au mois de septembre
ou octobre. Mademoiselle B. est séparé, son ex a déménagé, la laissant
célibataire, libre et heureuse dans un appartement grand, vide et bruyant. Au moment
d'allumer la chaudière car l'hiver pointe le bout de son nez, elle s'aperçoit
que plusieurs radiateurs restent froid. Après diverses tentatives de purge, arrêt/redémarrage
de la chaudière (mais ça ne marche pas comme l’informatique), tapage au marteau
(faut toujours essayer de taper, au cas où), Mademoiselle B. abdique, et décide
de rappeler le chauffagiste, prenant le risque de passer pour la
gonzesse incapable de comprendre comment allumer un radiateur sans un
homme à la maison.
L'entretien de chaudière avait été fait quelques semaines avant, et
Mademoiselle B. s'attendait à voir revenir le gentil artisan aux lunettes
en cul de bouteille et au strabisme convergent. Cela dit, il travaillait très
bien, et c’était le genre à être gentil même s'il venait pour rien.
Et Mademoiselle B. vit arriver un chauffagiste d'une trentaine d'année,
over sexy, super compétent, avec un jean très bien ajusté et des bras musclés.
Quand Mademoiselle B. a ramassé sa mâchoire par terre, elle a envoyé un message
à ses copines pour dire qu'elle vivait le début d'un porno intitulé "Le
chauffagiste était vraiment canon".
Mademoiselle B. et le chauffagiste ont beaucoup discutés, le courant
passait pas mal, et Mademoiselle B. a même hésité à lui proposer d'aller boire
un verre. Mais Mademoiselle B. est une flippette, et vit mal le risque de se
prendre un râteau - donc elle n'a rien fait.
Elle a rappelé la boîte peu de temps après pour reprendre rdv, parce que
Sexy Chauffagiste avait aussi regardé les prises de courant et remarqué qu'il
fallait changer des trucs (Sexy Chauffagiste était aussi polyvalent, et
Mademoiselle B. se demandait si cette phrase pouvait être vraie d'un point de
vue disons plus sexuel). Elle avait laissé échapper au patron de la boîte un
petit « Votre employé est un homme très charmant », ce qui n'a pas
manqué de le faire mourir de rire (la remarque pseudo-innocente devait en fait
dégouliner le stupre et la luxure). Il a alors dit : « Allez, je vous
le renvoie, je lui dis de vous appeler pour reprendre rdv. Vous faites ce que
vous voulez hein, moi je m’en fous, mais sachez qu’il a une femme et des
enfants ! ».
Les espoirs de Mademoiselle B. se sont brisés.
Et puis Sexy Chauffagiste n'a jamais rappelé.
Au bout de plusieurs semaines, Mademoiselle B. a rappelé la boite,
pour signaler, un peu penaude, qu'il y avait toujours des problèmes
d'électricité. Le patron, nettement moins joyeux sur ce coup-là, a annoncé
froidement que Sexy Chauffagiste ne travaillait plus pour lui.
Mademoiselle B. a paniqué.
MON DIEU, peut-être que, après son hilarité d'il y a 1 mois, Patron s'est
finalement fâché contre Sexy Chauffagiste, lui rappelant qu'il lui avait dit
d'être courtois avec Josette, 94 ans au rez-de-chaussée, mais pas charmant avec
Mademoiselle B., 28 ans au 1er étage, et que tout ça n'est pas très
professionnel, et qu'il l'a viré ?
Peut-être que Sexy Chauffagiste, devant un torrent de désirs face à une
cliente si séduisante, a préféré démissionner plutôt que de mettre en
péril sa famille ?
Peut-être que le Patron a rapporté la remarque à Sexy Chauffagiste, qui l'a
trouvé déplacé et effrayante, et a préféré quitter la boîte plutôt que de
risquer son petit corps appétissant dans la tanière de Mademoiselle B. ?
Peut-être que Sexy Chauffagiste, en proie à un insatiable désir doublé d'un
insoluble questionnement, a tout quitté (emploi, famille, potentielle femme de
sa vie) pour partir méditer le drame de sa vie dans la foret/une caverne/une
montagne/etc.
Mademoiselle B. n'a jamais su, et en a gardé une culpabilité latente.
Un peu.
De temps en temps.
*FIN DU FLASHBACK*