Finalement, dimanche soir il était trop mal, on a reporté
à lundi soir ; gueule de bois. Mais soulagement indescriptible quand il a
proposé qu’on se voit. « Oui, je vais le voir une dernière fois avant le
départ. Une dernière dose avant le voyage ».
Et sentiment de pathétique devant ce soulagement.
Je suis arrivée vers 22h. J’avais des choses de prévues.
Et une journée de dingue avant ça.
C’était le Jumeau-Maléfique.
Il y a une forme de régularité finalement : 2 fois
Jumeau-Tendresse, puis Jumeau-Maléfique.
Ou est-ce que le Jumeau-Maléfique refait surface après les
week-ends de cuites ? Ça colle aussi.
Notre étreinte à mon arrivée est brève.
Nous restons immobiles et silencieux sous le plaid, sans
nous toucher, seulement l’un contre l’autre. Il reste attentif malgré tout ; il me sert un thé, me propose des chocolats. Mais
notre immobilité est pesante – et je n’ose pas le caresser la première.
Il me propose de monter, alors qu’on est un peu en train
de s’endormir tous les deux. Il monte sans m’attendre. En haut, il est couché
quand j’arrive. Pas de petit regard brillant lorsque j’enlève mes vêtements. Pas
de regard tout court. A peine suis-je glissé entre les draps qu’il éteint la
lumière.
Un coup au cœur : de « mon » côté du lit,
un Labello. A qui est-il ? A lui ? Tube bleu. Ce n’est ni féminin, ni
masculin. Neutre. Mais il dort plutôt de l’autre côté, et met plutôt ses
affaires là bas. Une autre "régulière" marque son territoire ? Comment
savoir ?
Je me dis que « j’oublierai » une pince à
cheveux, la prochaine fois. Pour voir. Pour communiquer avec les autres,
peut-être. Ou pour marquer mon territoire moi aussi.
Il me caresse doucement. Malgré son attitude taciturne,
il est toujours aussi attentif. Il m'enlève mes sous-vêtements très rapidement. Ses gestes sont
de plus en plus précis. Bon sang, ce mec apprend vite : d’une fois à l’autre,
il me connait de mieux en mieux. Juste quelques mouvements des doigts, et je
suis déjà au bord de l’orgasme, sur un rivage délicieux où toutes mes
sensations sont démultipliées. Comment de simples caresses peuvent m’allumer à
ce point ?! (Même moi, quand je me touche, ce n’est pas aussi bon.
Pourtant je suis censé être la première à savoir où appuyer !)
Il me demande de le sucer, d’une voix excitée,
implorante. Mon Dieu, avec plaisir. Moi aussi je commence à saisir ses
réactions, agir en fonction de ses mouvements, de son souffle. Je l’amène au
bord de l’orgasme à mon tour, et avec une facilité et une rapidité
déconcertante. C’est presque trop rapide. Il souffle « Mais tu veux me
faire jouir ?! », et je ris.
Je m’installe sur lui, hors de question de n’en rester qu’aux
préliminaires. Je galère, j’ai mal au genou, je lui dis, il rigole. Je lui dis
que ça c’est enflammé. Il n’en peut plus. Il me demande comment j’ai bien pu
faire ça, je lui dis que je n’en ai aucune idée : j’ai dû me brûler sur
les draps. J’ignore quand. A croire que j’étais vraiment loin, et pas vraiment
là, pour ne rien avoir senti. Il ri, il n’arrive plus à s’arrêter – et je sens
derrière l’hilarité que ça lui fait plaisir. Et pendant que nous rions de mon
genou blessé, nous faisons l’amour.
Sans que je comprenne vraiment comment, nos mouvements
passionnés me font monter un orgasme délirant. Mon
Dieu, c’est un orgasme vaginal ?? La dernière (et seule) fois où j’en ai
eu un, j’avais 18 ans. Il ne semble plus s’arrêter, et se diffuse dans tout mon corps. Je m’accroche à lui, gémis, enfonce mes ongles dans ses
épaules. Je ne sais plus où donner de la tête. Il me souffle qu’il faut mettre
une capote. C’est urgent. Il halète comme je l’ai rarement entendu. Je dois reprendre
mes esprits. Me calmer. On rit un peu. J’attrape la dernière capote. La boite n’a
pas bougé.
On continu, et puis il jouit. On s’écroule l’un sur l’autre.
Il rit encore : « Ces deux là sont pas sportifs pour un clou ! ».
Ça me fait rire. On rit tout les deux, l’un contre l’autre, nos corps moites et
notre souffle court.
J’adore ça.
Il descend
chercher de l’eau, et lorsque je m’assois pour boire, ma tête tourne.
Bon sang, ai-je déjà ressenti un truc pareil ?? « Je
sais pas pour toi, mais pour moi c’était juste dingue ». Il rit. Et me dit
que pour lui aussi, c’était bien.
On commence à s’endormir, mais j’ai encore envie. Je le
caresse. Sans trop savoir si je me ferai repousser ou pas. Je m’attarde
longuement sur ses fesses – Que j’aime ses fesses bon sang. Lorsqu’il se
tourne, je commence à le caresser. Je constate avec plaisir une érection très
honorable. Quoique un peu faiblarde – qu’importe, je me glisse sous la couette,
et en quelques coups de langue, voilà qui est mieux. Dans un état de
demi-sommeil, il guide ma vitesse, mes mouvements. C’est tendre, c’est bon. Et
il est de nouveau au bord de la jouissance. Mais je veux aussi en profiter.
Alors je me redresse, et de nouveau, le chevauche. Il m’arrête immédiatement :
on met la capote tout de suite. Trop risqué.
Mais la boite est vide, me dis-je.
Et pourtant il en sort une, de je ne sais où.
Je ne comprend rien.
A vrai dire, tout de suite, je m’en fous.
A peine est-il en moi que je sens déjà de multiples
sensations – je suis prête à renchaîner avec un orgasme comme tout à l’heure.
Je me dis fugacement que ce mec est un putain de magicien avec une baguette
magique à la place de la queue.
Mais je n’avais pas réalisé à quel point je l’avais
excité, et en quelques secondes, il vient, dans un petit hoquet de plaisir. J’adore
l’entendre. Ça m’a fait rire. Je lui dit qu’il aurait pu m’attendre. Il répond que je l’avais déjà bien chauffé avant, qu’il ne pouvait pas.
Mais j’étais encore très excitée.
Alors je me suis collée à lui.
Il m’a caressé, mais je ne venais pas, et j’avais juste
envie de lui, encore.
Épuisé, il a fini par me dire que je devais redescendre.
C’est son mot ça : « redescendre ». C’est drôle.
Je ne savais plus quoi faire de mon corps. Il m’a supplié
d’arrêter.
J’ai fini par m’écarter de lui, le simple contact avec sa
peau m’électrisait.
Plus tard, lorsqu’il s’est endormi, je me suis caressé,
avec mes mains pleines de son odeur.
Mais à peine avais-je eu un orgasme que j’étais de
nouveau excitée.
Insupportable.
Je ne savais plus quoi faire avec moi même.
J’ai fini par m’endormir.
Réveillée à 5h du matin.
Je repense au Labello. Aux capotes : quand y’en a
plus, y’en a encore. Et si une fille était là ce week-end, alors ?
Il y aura forcément des traces.
Suis-je folle ?
Je suis descendu aux toilettes, j’ai inspecté la
poubelle. Des coupons de papiers toilettes avec ce que j’ai pris pour du sang.
Mais je sais qu’il a des amies. Alors est-ce que ça
prouve grand-chose ?
J’ai regardé la poubelle de la cuisine. Un emballage de
capote. Frisson. Je l’entends remuer en haut. Je remonte. Je cogite. Je suis
bête : et s’il avait descendu l’emballage de tout à l’heure en allant
chercher l’eau ? Bon sang ça me rend dingue. Je me dis que je jetterai un œil
lorsqu’il se lèvera.
Et puis je bad.
Le voyage approche. Je n’ai pas envie de partir. Et en
même temps, j’ai envie de partir ; mettre de la distance entre ma vie et
moi. Faire le point.
A 6h30, j’ai une boule d’angoisse à l’estomac à force de cogiter. Nausée. J’ai envie et besoin d’être contre lui. Comme si ça n’arrivera plus jamais.
Je me glisse contre sa peau, et le serre fort contre moi.
Peur qu’il me repousse, après mon insatiabilité de cette nuit. Mais non, il se
met de côté ; je peux le prendre dans mes bras, poser ma tête sur son dos,
et m’ennivrer de son odeur. Je m’accroche à lui. Est-ce que ce sont des adieux ?
J’agis comme si je ne le reverrai plus jamais. J’essaie de me répéter, comme le
voulait Monsieur Sophrologie « J’y arriverai ». Je ne sais même pas à
quoi je veux arriver. A l’oublier ? Lorsque le réveil sonne, j’ai envie de
lui demander de prendre juste 2 min pour me serrer dans ses bras. Mais je n’ose
pas. Il reste 1 petite minute dans le lit avant de se lever.
Je soupire.
Ça y est. Time’s out.
Il a ramassé les capotes en se levant. Plus rien ne
traîne. La boite est toujours vide. Mais d’où a-t-il sortit la deuxième ?!
Et puis… La boîte était-elle rouge, avant ? Je suis presque sure qu’elle
était bleue….
Je fais tomber le Labello.
Ça sera ma petite rébellion pour montrer ma présence.
En bas, il prend sa douche. Jumeau-Maléfique ne gardera
pas mon odeur sur lui aujourd’hui. Moi, je garderai la sienne le plus longtemps possible.
Je profite qu’il est sous la douche pour revérifier la
poubelle. Deux capotes. Les nôtres. Rien de plus. Il avait effectivement débarrassé au fur et à mesure. Jumeau-Maléfique n'aime pas laisser traîner les capotes. Il trouve ça dégueu.
Sur la table du salon, un labello. Tube bleu. Le même qu’en
haut. Les Labello se vendent souvent par deux.
Je suis peut-être définitivement folle.
Nausée.
Il sort en boxer de la salle de bain. Il est beau. J’ai
envie de lui dire, mais je n’ose pas. Pas sûre que ça soit le truc à dire à
Jumeau-Maléfique.
Il parle peu.
Moi je ne dis rien.
Nausée.
On sort. Il fait froid, mais pas de gel.
On se prend dans nos bras. Les mêmes personnes
qu'il y a une semaine attendent le bus, à quelques mètres de là. Il me souhaite bonne vacances. Notre
étreinte dure un peu – plus qu’hier soir. Je lui dis « serre moi fort ».
Je me demande si c’est la dernière fois que je le vois.
Je monte dans ma voiture. Ses phares m’éblouissent quand
il passe à coté de moi. J’ignore s’il me fait un signe.
Nausée.
Je rentre chez moi, dans un état indescriptible.
Une folle envie de pleurer, mais qui ne vient pas.
Pourquoi je ne peux juste pas pleurer ?!
Et pourtant, je pense que c'est mieux comme ça. Saturation. Impossibilité de prendre du recul. Trop d'émotions en moi. Besoin de vacances.
Et pourtant, je pense que c'est mieux comme ça. Saturation. Impossibilité de prendre du recul. Trop d'émotions en moi. Besoin de vacances.
Un besoin impérieux d’écrire tout ça.
Pas de lever de soleil aujourd’hui.
Juste une journée blanche et froide.
Juste une journée blanche et froide.
Plus que quelques heures avant le départ.
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