vendredi 24 novembre 2017

De la dictature du poil


Charles-Henri : « Tu sais la première nuit qu’on a passé ensemble, tu m’avais dit que tu étais en jachère niveau poils… Pas de soucis hein… Mais depuis… heu… Voilà…. Je t’avais dit que c’était pas trop mon truc et … heu…. Tu m’avais dit que tu ferais quelque chose et… »
« Ben…. Comme c’est là, ça va pas ? »
«  Ah parce que tu as fait quelque chose, là ?! »

Ah.

Visiblement, nous avons une incompréhension.


Et je dois bien avouer que c’est tout à fait récurrent dans mes relations, puisque Hector tenait le même discours… (Enfin…. De façon moins bien diplomate, nous en conviendront).

Donc je me retrouve face à plusieurs problèmes, et une sorte de dilemme moral :

- Le premier et non le moindre : J’ai une peau de merde. Je suis abonnée aux « folliculites », c’est-à-dire les poils incarnés, mais puissance mille : j’ai dû aller voir un médecin, car après une épilation ou un rasage, mes jambes se couvrent de boutons purulents, parfois d'une grosseur et d'une profondeur alarmante : j’ai des cicatrices épouvantables, et surtout, c’est hyper douloureux. 
Et ça, c’est juste mes jambes.
Autant dire que je suis très, très réticente quant à l’idée de voir si ça pourrait faire la même chose là-où-je-pense.
Ma « solution » pour l’instant, du moins concernant mes jambes, c’est l’épilation définitive. 210€ toutes les 6 semaines chez un médecin esthétique (une dermato, c’était 360€, et de toute façon, c'est non-remboursé). 
SAUF QUE la moitié de mes poils sont noirs, et l’autre moitié sont blonds – bien sûr, ça ne marche que sur les noirs. 
SAUF QUE, à la repousse, j’ai exactement le même problème d’infection. Mon seul espoir reste qu’au bout d’un moment ils ne repousseront plus (d'ici un an et demi/deux ans)
Bref, je n’ai pas de solution idéale, et je souffre.

Ça ne me correspond pas : j’ai toujours eu des poils, j’ai grandi dans une famille où tout le monde avait des poils (ma mère ne s’est jamais rasé nulle part, y compris sous les aisselles, et ça me parait complètement normal). J’aime mon petit triangle XIXe siècle, qui est à mes yeux désuet et charmant.
Alors qu’on s’explique tout de suite : je ne suis pas non plus en mode Woodstock hein. Ma technique, c’est un petit coup de tondeuse pour laisser 1cm ou 2 de poils au niveau du pubis. Ensuite je rabote le maillot, juste pour que ça soit clean . Et je rase « en dessous ».
Bref, pour moi, c’était propre et charmant. Sauf qu’en fait, visiblement personne ne partage mon avis.

- Du coup il faut être honnête : je ne sais pas du tout comment faire. Dans ma famille nous étions des hippies.
Avec mes copines, on n’est pas à l’aise à ce point.
Ma seule copine ultra à l’aise avec son corps, elle pratique l’épilation intégrale, et là, c'est non.

- Je trouve ça vraiment moche. Trop court, c’est moche. Intégral, je déteste. Les épilation fantaisie, n’en parlons pas !
En plus je n’aime pas spécialement cet endroit-là de ma personne (je trouve mon appareil génital trop ostentatoire - si tant est que cette phrase ai un sens pour quelqu'un d'autre que moi). Du coup, pour moi, son écrin très XIXe siècle lui va très bien.
... Mais c'est seulement à mes yeux, encore.

- Et enfin, je dois bien avouer que ça entre en contradiction avec mon refus de conformisme sociétal. Quelques exemples : Avez-vous remarquez qu’une pub pour un rasoir, la fille est déjà glabre ?! Genre avoir des poils, c’est déjà anormal !
J'avais vu à l'époque une vidéo très bien sur le sujet, qui m’a fait prendre conscience de beaucoup de choses. (Je l'ai retrouvé à cet endroit pour ceux que ça intéresse)
Et je ne parle même pas du côté pas naturel et violent de la chose.

En conclusion, et en toute logique, ça fait beaucoup d'arguments qui rentrent en contradiction avec ce qui me semble être mon « « moi » profond et réfléchi. 
Tout ça pour quelqu’un d’autre.

Les publications se multiplient concernant le sujet : le vrai féminisme, c’est s’écouter, c’est faire ce qu’on aime, et avoir le corps qu’on a envie. 

Libres ! Manifeste pour s'affranchir des diktats sexuels

Sommaire :

Chapitre 1 : Sirop de corps d’homme
ou comment on nous fait croire que le sperme est incroyablement bon pour la santé.
Chapitre 2 : Gras double
ou comment réussir à aimer son corps (pour aimer l’union avec un autre corps) avec ses bourrelets et rondeurs.
Chapitre 3 : Cachez ce sang que je ne saurais voir
ou comment tout le monde se dit « libéré » par des pratiques sexuelles alors que le sang des règles reste encore sale.
Chapitre 4 : Bouge ton boule
ou comment il faut subir la nouvelle norme d’avoir un « cul rebondi et rond » mais avec la taille fine et toujours sans cellulite.
Chapitre 5 : I kissed a girl and I liked it
ou comment la bisexualité est devenue la nouvelle tendance… uniquement féminine.
Chapitre 6 : Plus on est de fous, plus on rit
ou pourquoi être en couple est devenu ringard et devenir polyamoureux est hype.
Chapitre 7 : C’est dans les vieux pots…
ou pourquoi les femmes de 40 ans peuvent encore avoir une chance d’être « baisable » malgré leurs rides.
Chapitre 8 : Le point G, ce mal aimé
ou pourquoi on n’a pas encore vraiment étudié et analysé (et rendu public) le fonctionnement de l’organe du plaisir féminin.
Chapitre 9 : La burqa de chair
ou comment on continue d’expliquer aux femmes ce qu’elles doivent porter
Chapitre 10 : Gazon maudit
ou pourquoi on oublie que les femmes sont nées avec des poils (elles aussi).
Chapitre 11 : Dans l’cul lulu
ou pourquoi la sodomie reste un « plaisir » féminin synonyme d’humiliation et de domination.
Chapitre 12 : Tu veux voir ma chatte ?
ou comment le zizi est toujours facile à dessiner et la zezette une inconnue qui fait peur.
Chapitre 13 : Le ciment du couple
ou pourquoi le sexe reste une monnaie au sein du couple.
Chapitre 14 : La moyenne nationale
ou pourquoi on continue à quantifier le niveau d’activité pour juger un couple.
Chapitre 15 : Cinquante nuances de conservatisme
ou comment la société cultive la rencontre entre une femme qui doit être pure et vierge pour séduire un homme dominant et pervers.

Oui mais…

Est-ce que j’ai envie que mon mec me désire moins ?
Est-ce que j’ai envie que mon mec rechigne à certaines pratiques à cause de ça ? (Qu’on soit clair : j’ai pas envie de ne plus avoir de cuni)
Est-ce que je suis  prête à ce que ça devienne un réel problème dans mon couple ?

Ça semble exagéré, et pourtant, n’en déplaise aux détracteurs de l’épilation, ça ne l’est pas : les hommes vont être plus frileux à certaines pratiques. Donc le sexe sera moins épanouissant pour les deux. Je refuse d’être sexuellement frustrée dans mon couple (c’est bon, j’ai déjà donné). Je n’ai pas envie non plus que mon mec « tolère » mon corps : je veux qu’il en soit fou, ni plus, ni moins !
Parlons vrai : les mecs qui s’en foutent, ou qui sont partisans des filles « natures », il n’y en a pas des masses (et visiblement, Charles-Henri n'est pas de ceux là). Pourtant, j’ai tendance à côtoyer des personnes qui s’interrogent sur le monde, des néo-hippie, bref, pas non plus des hippsters-top-models-instagramer.
Mais c’est plus fort que nous : c’est putain de culturel.

Ensuite, est-ce que je prends le problème dans le bon sens ? 
Clairement, je prends cette remarque comme une atteinte à ma personne et à ma personnalité. J'y vois une sorte de demande de soumission, ce qui n'est très probablement pas l'objectif de Charles-Henri (Hector, on pouvait se poser la question, mais avec Charles-Henri, les choses sont beaucoup plus saines). Il n'a pas fait de chantage, il a même tenu à insister sur le fait que, si effectivement ma peau fait des réactions, je devais absolument laisser tomber. 
Mais la phrase a été dite, et du coup ma machine à réflexions s'est lancé : "Il n'aime pas celle que je suis". 
Mais est-ce que c'est réellement ça ?!
Est-ce que ce n'est pas juste "Je te préférerais avec moins de poils", tout comme on pourrait dire "Je te préfère avec les cheveux longs/courts/violets" ? 
Est-ce que je ne suis pas en train de laisser s'enflammer (inutilement) mon féminisme vindicatif ???
Mais comment vivre ça sereinement ?
... Et comment diable entretiens-t-on cet endroit pileux de notre anatomie ???

2 commentaires:

  1. C'est marrant, je suis en train de le lire ce bouquin ahaha
    Les poils, toute une histoire.
    Je suis en mode "balec" en ce moment, pas de mec, pas d'épilation, plein de poils.
    Plus ça pousse, plus doux c'est, plus jolie est la toison. Sérieux, dommage de m'en séparer, je recule l'échéance, j'aime de plus en plus mes poils. Qui l'aurait cru ? Moi l'adepte de l'intégral...
    Pour des questions purement sexuelles, je préfère qu'il n'y ait rien, c'est mieux pour les caresses manuelle et buccales.
    Sincèrement, je pense que tu devrais faire une sorte de compromis : genre tondre à quelques millimètres partout et raser en dessous. Essaie, au moins tu gardes tes poils, t'es pas emmerdée avec la repousse car ils sont déjà là.
    Je sais ce que c'est les poils incarnés = cauchemar. J'ai tenté l'épilation laser mais j'ai du mal à supporter la douleur et surtout le budget.

    Y'a toujours moyen de trouver un entre deux, non ?
    Ce serait dommage de se couper de certaines pratiques et surtout dommage de se séparer de tes idées !

    Bises <3

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    Réponses
    1. C'est finalement ce que j'ai tenté ! Et ça passe assez bien, ça ne fait pas de poils incarnés. De toute façon je suis anti-intégral, et c'est hors de question que je fasse du laser à cet endroit (c'est déjà tellement douloureux sur les jambes... Et en effet, laisse tomber le budget !)
      Mais du coup vu les circonstances, bah je vais retourner à la repousse. Ça sert à rien de continuer à être nickel de là dessous, pas vrai ?
      Et je suis d'accord avec toi (et contente que quelqu'un partage mon avis, tiens) : c'est joli et doux ! Mais carrément !
      Et ça m'étonne pas du tout que tu sois en train de lire ce livre ;) Il y a une féministe qui dort en toi, Matka :D
      Bisous <3

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