Extrait de Aime moi, por Favor ! / Lucia Extebaria, dont je parlais ici.
Etre triste me rend contemplative. Un peu comme si regarder les autres me permettait de prendre de la distance avec ce que je ressens.
Ma Psy m'a
invité à accepter ma sensibilité - ce que je refuse de toute mes forces. Mais
devant mon entêtement, elle a choisi une métaphore : « Vous avez la peau
très claire. Si vous voulez vous mettre au soleil, vous brûlez. Vous pourrez
souhaiter de toute vos forces avoir la peau mate, ça n'arrivera pas : Vous ne
ferez que brûler ».
J'ai
acquiescé : Oui, finalement, notre nature est aussi immuable que notre
physique. Et je suis passé à l’écran total depuis des années, alors pourquoi ne
pas admettre le reste ?
Je me suis
alors souvenu d'une histoire que ma mère m'avait raconté un jour : mon tout
premier jour d'école, à 3 ans, j'étais partie à la rencontre de la classe et
des autres enfants avec curiosité et confiance - ma mère était la seule à le vivre
mal.
Et puis
j'ai avisé un petit garçon assis dans un coin, en train de pleurer. Alors j'ai
été m'asseoir à côté de lui, je l'ai regardé... Et j'ai pleuré avec lui.
Je crois
que je suis une personne empathique. Et parfois, je comprends des choses sans
qu'on me le dise. J'ai une collègue qui m'a un jour avoué en chuchotant « Tu
sais, je ne l'ai jamais dit à personne mais... je suis homosexuelle ».
Et moi j'étais surprise, parce que ça me semblait d'une évidence limpide, et je
croyais que tout le monde était au courant. Et en fait pas du tout : elle n'en
avait jamais parlé, elle le cachait, elle le vivait très mal.
Elle m'a
d'ailleurs annoncé il y a quelques jours qu'elle avait rencontré quelqu'un, et
que ça se passait très bien. J'ai été enchantée de l'apprendre. Elle a apparemment enfin arrêté de penser qu'elle n'avait pas le droit d'aimer et d'être aimé.
Cette
semaine, j'ai mangé avec une autre collègue. Elle m'a parlé d'un homme
rencontré il y a quelques mois, un artiste guinéen. Rien dans son discours ne
me permet de le prouver, mais je suis absolument certaine qu'elle a une
relation avec cet homme. Evidemment, elle ne va pas se confier à moi : elle est
mariée depuis plus de vingt ans, et je ne suis qu'une collègue. J'ai essayé de
prendre du recul, et d'analyser pourquoi j'avais déduit ça. Je n'ai pas trouvé,
mais je suppose que c'est un tout : je l'observe en parler souvent, j'observe
son langage corporel, et intuitivement, je comprends.
Je me suis
demandé si j'assistais au début d'un désastre annoncé, d'un mariage qui va
voler en éclat. Comme je ne suis rien sensé savoir, j'attends, et j'observe. Et
si besoin, je tacherai d'être une épaule compatissante, comme elle a pu l'être
avec moi il y a quelques mois.
Le
lendemain, j'ai mangé chez une autre collègue.
Là, le
schéma était complètement différent. A 25 ans elle a deux filles, qu'elle élève
seule car le père s'est radicalisé et est parti dans un autre pays. Elle essaie
tant bien que mal de survivre, et d'expliquer à ses filles qu'il y a
différentes formes de religion - et que la façon dont leur père vit la sienne
n'est pas la seule et unique façon de faire.
Elle vit
dans un appart minable, au 5e étage sans ascenseur, elle est entouré de gens
qui touchent à la drogue, et lorsqu'elle dit « Cette personne, je la
déteste », c'est pas pour des broutilles, mais plutôt : « Parce
qu'il vend de la coke à des mineurs et je trouve ça intolérable ».
Son
quotidien est fait d'histoires brisées, d'alcooliques, de junkies. Elle peut
dire d'un seul coup d’œil « Celui-ci carbure à telle drogue ».
Et c'est
son entourage, c'est sa vie, son quotidien.
Ça m'a
interrogé, sur les différences entre nous tous, la différence de nos vies,
l'injustice de nos parcours. Je n'ai pas trouvé ça juste, pas mérité.
Mais je
crois que, même si ça me rend folle, je dois me faire à l'idée le bonheur et la
chance ne sont pas forcément offert à ceux qui le mérite...
Ensuite j'ai été passer un week-end chez Président. Il s'est absenté pour prendre une douche, et son mec m'a dit : « Je vais te dire quelque chose que Président ne voudrait pas que tu saches... Mais je préfère t'en parler ».
(J'avoue, j'ai eu peur)
Il a continué : « En réalité, on n'est plus ensemble. Ça fait déjà deux semaines. On fait un peu semblant - et puis on s'apprécie toujours beaucoup, mais lorsque j'aurais fini mon mémoire, je fais mes cartons et je m'en vais ».
Et il a ajouté : « Tu ne dis rien à Président hein ? Il ne doit pas savoir que tu le sais. Mais je ne veux pas que tu arrives un week-end, et que tu apprennes seulement à ce moment là que je suis parti ».
J'ai donc fait semblant de rien devant Président.
Ce qui a été une foutue performance digne de l'Actor Studio.
Et je me suis dit que, malgré nous, les choses changeaient continuellement.
Ensuite j'ai été passer un week-end chez Président. Il s'est absenté pour prendre une douche, et son mec m'a dit : « Je vais te dire quelque chose que Président ne voudrait pas que tu saches... Mais je préfère t'en parler ».
(J'avoue, j'ai eu peur)
Il a continué : « En réalité, on n'est plus ensemble. Ça fait déjà deux semaines. On fait un peu semblant - et puis on s'apprécie toujours beaucoup, mais lorsque j'aurais fini mon mémoire, je fais mes cartons et je m'en vais ».
Et il a ajouté : « Tu ne dis rien à Président hein ? Il ne doit pas savoir que tu le sais. Mais je ne veux pas que tu arrives un week-end, et que tu apprennes seulement à ce moment là que je suis parti ».
J'ai donc fait semblant de rien devant Président.
Ce qui a été une foutue performance digne de l'Actor Studio.
Et je me suis dit que, malgré nous, les choses changeaient continuellement.
Et puis
quelques jours plus tard, une autre collègue m'a téléphoné en début de soirée.
J'étais étonnée - et vaguement inquiète, car nous ne sommes pas vraiment
proche. « Je t'appelle parce que... heu.... Je me suis dit que tu étais la
meilleure personne pour ça.... »
-
- Heu..... Ouiiii ?
*silence*
*J’attends
patiemment*
-
- ....Les mecs, c'est tous des SALAUDS !
- - Oh. Ça. Oui, ben oui, bien sûr.
Elle m'a
raconté que son ex se tapait sa belle-sœur, la copine de son frangin. J'ai donc
abondé en son sens : c'est plutôt sale, en effet. Je l'ai laissé déverser sa
haine, et elle a pu raccrocher soulagée.
Bien.
Apparemment je deviens la Madone des cœurs brisés.
A priori,
tu peux donc toi aussi m’appeler si tu penses que les mecs sont tous des
salauds.
De toute
façon, dans l'ensemble, je suis assez d'accord avec ça.
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