mardi 11 février 2020

Histoires d'Airbnb : Jean-Claude, le détendu

Jean-Claude a réservé très longtemps à l'avance, environ deux mois avant d'arriver. Il m'a envoyé tellement de messages pour savoir s'il fallait qu'il achète des pneus neiges, si je pensais qu'il allait neiger/geler, que je me suis dit qu'il s'était trompé dans les dates, et qu'il arriverait la semaine prochaine.
Mais, non, les dates étaient bonnes.
« Je suis un homme très prévoyant », me dit-il.
« Le problème étant que la météo n'est pas prévoyante deux mois à l'avance, alors je ne pourrais pas vous répondre au sujet du temps ».
Cela dit, il devait travailler à 5 minutes (top-chrono) de chez moi, et n'avait en aucun cas besoin de se faire des nœuds au cerveau pour la route - d'autant plus que je suis loin d'habiter l'Alaska, il peut se détendre.
Il a pris mon numéro de téléphone "pour m'appeler quelques jours avant pour être sûr", et s'il n'y avait pas eu les commentaires élogieux sur sa page, je me serai vraiment inquiété. Cela dit, je sentais arriver le relou.
Il a finalement acheté 4 pneus neiges.
Parce qu'il est prévoyant, 'voyez.

Le jour de son arrivée, je trouve donc sur le seuil de ma porte un homme, je dirai 65 ans bien sonné. Il prend son temps, retourne à sa voiture, sort sa valise, revient, ressort. J'attends, ma porte ouverte.
- Ne prenez pas froid, me dit-il.
"Oui ben bouges un peu ton cul, alors", je pense très fort.

Il fait tout trèèèèès lentement, et je prends donc sur moi.
Cela dit, il est très gentil, très poli, et très bavard.

Je lui montre la chambre, puis m'en retourne à mes occupations.

Il redescend une demi-heure plus tard, se préparer à manger dans la cuisine.
Il a un mini-peignoir, qui s'arrête en haut des cuisses, et rien en dessous. Des chaussons Laurel et Hardy, et des chaussettes à mi mollets.
- Je me suis permis de me mettre à l'aise !
- Ah, heu... oui... Je vois...

Entre nous, je vois même un peu trop.

Il me parle de sa vie d'artiste : il est comédien - enfin, non, là il est démonstrateur de couteaux en supermarchés, mais au fond de son cœur il est comédien. Il a joué Madame Doubtfire. Il veut écrire un one-man-show.
Et puis il a des problèmes de hanches, et de pieds, et il s'est fait opérer du pied, plusieurs fois, mais le problème persiste, et même il a encore plus mal qu'avant depuis qu'il s'est fait opérer. Et le résultat est très moche, et vraiment...
Je ne sais pas si ma panique se voit sur mon visage, mais il me dit :
- Je ne vais pas vous montrer, hein
- Ah !
Je me détends immédiatement.

Il me tchatche pendant 2h, et je me dis que si je veux des soirées tranquilles, j'ai intérêt à me planquer dans ma chambre ou ne pas rentrer.
D'ailleurs ça tombe bien, je passe les deux soirées suivantes chez Isaac.

3 jours plus tard, je re-croise Jean-Claude. Toujours avec son mini peignoir - mais j'ai baissé le chauffage (je sentais qu'il avait trop chaud) alors il a mis des trucs en dessous.
Il me raconte sa vie à nouveau. Ca part dans tous les sens : sa compagne est alcoolique, lui il boit un peu, dans son spectacle il parlera de féminisme, et puis lui c'est un comédien dans l'âme, il adore faire rire les gens, au supermarché il montre qu'il vend des supers couteaux, il coupe un marteau avec ses couteaux (?), il va m'en laisser un, il adore le vin.
Et puis soudain il me raconte que sa compagne n'aime pas le sexe, qu'il a tout essayé, il s'est même dit que c'était lui qui ne lui faisait pas envie, alors il a demandé à un pote de la draguer et de coucher avec elle, sauf qu'elle ne l'a pas bien pris. Du coup il pense que ce n'est juste pas son truc.
Mais tout de même, ça l'embête, parce que le plaisir sexuel, c'est super important ! D'ailleurs il en parlera dans son spectacle, il dira que les femmes doivent a-bso-lu-ment vivre leur sexualité librement, et que peut-être il ne se fera pas d'amis en disant ça. Mais il le pense, hein. Et d'ailleurs, il se considère comme libertin. Lui, il adore le cul.
- Ah ouiiii, très bien....
Je commence à comprendre où il veut en venir, et à me sentir très très mal à l'aise.
- D'ailleurs je dors très mal la nuit, j'ai toujours beaucoup de mal à m'endormir...
- Ah mais attendez ! Pas de soucis ! Je vais vous faire une tisane ! Une petite camomille, vous verrez, vous dormirez su-per-bien.
- Ah heu... ?
- Voilà ! Et je vous ai mis une grande tasse. Si, si, je vous en prie, buvez là dans votre lit, au calme, comme ça vous serez super détendu, vous dormirez mieux. Allez, foncez tant que c'est bien chaud ! Et bonne nuit hein !

Lorsque je raconterai, plus tard, l'anecdote à Isaac, que j'aurais au téléphone, je l'entendrais s'étouffer dans sa bouffée de cigarette.
- Wohputain (*keufkeufkeuf*), il y a besoin que je vienne ?!
- Meuh non, c'est bon, Jean-Claude à sa camomille. Et puis les libertins ne sont pas des violeurs en puissance, normalement.

Lorsque Jean-Claude partira, il me laissera des tas de cadeaux : des bouteilles de vin, un de ses fameux supers couteaux, un marteau (il m'a bien cerné, tout de même), des gadgets pour presser les citrons, et quelques denrées alimentaires.

Je lui ai envoyé un message pour le remercier de ses cadeaux.
« Mais avec plaisir, c'est parce que je me sentais bien chez vous. D'ailleurs, je reviendrai ! a bientôt ! »

Ah, heuuuu..... Oui.... Nous verrons hein !

1 commentaire:

  1. T'es bien trop gentille...
    C'est une qualité, mais parfois (ce cas en fait partie), aussi un défaut. :)

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