dimanche 24 novembre 2019

Weekend pluvieux avec Isaac, à la veille du concours


Isaac est donc "en break", en s'apercevant que sa compagne depuis plus de dix ans "n'est pas sûre" d'avoir jamais pris du plaisir avec lui, et comme elle a besoin de deux semaines pour réfléchir à cette question, nous avons décidé de passer un bout du weekend ensemble.


Je ne savais pas trop comment me positionner : est-ce que c'est moral de passer le weekend avec lui alors que sa copine est en introspection et que les fondations de sa vie vacillent ?
Mais est-ce que c'est mon rôle d'être la conscience de qui que ce soit ?
Et puis égoïstement, je me suis dit que cette opportunité ne se reproduirait pas de sitôt, que je rêvais d'une grasse mat' avec Isaac, et surtout que je passais mon oral le lundi matin, et que j'adorerai me changer les idées dans ses bras pendant deux jours (plutôt que de ronger le coin de mes meubles en stressant).

Isaac voulait m'emmener le vendredi soir voir un spectacle, mais j'ai refusé : il avait pris des places pour lui et Victoria, ça me semblait déplacé, et surtout, nous risquions très fortement de rencontrer des gens qu'il connaissait. Personnellement, je ne voulais pas nous infliger ça.
Il m'a rejoint le samedi en début d'après-midi. Je lisais, allongé sur mon lit, dans un timide rayon de soleil, le chat endormi contre moi, lorsque ça a sonné. Je l'ai trouvé sur mon perron en tenue décontractée, pas rasé, avec des lunettes - bref, de quoi me faire craquer. Malgré le fait qu'il n'a pas dormi chez lui, il sent son parfum. Mon nez se perd dans son cou.
« Qu'est ce que je sens ? »
« Toi. Enfin, toi et ton parfum ».
« Je sens Yves Saint Laurent alors. J'ai changé récemment ». 
En tout cas l'odeur lui va bien.

Nous avions décidé d'aller voir une expo photo en plein air - ce petit rayon de soleil timide nous a paru de bonne augure.
Une petite demi-heure de route, où je regarde son profil pendant qu'il conduit, en ayant l'impression d'avoir une vie de couple. 
Et lorsque nous arrivons, il commence à pleuvoir.
Ça ne nous effraie pas, on cherche le lieu d'expo - qu'on ne trouve pas. On fini par demander notre chemin dans un café. « Prenez la voiture, c'est à 1 km ! ».
On y va à pieds.
Il commence à pleuvoir plus fort.

On arrive sur le lieu d'expo, qui est sous les arbres, et nous sommes un minimum abrités. On regarde, Isaac lâche des petits « Mais cet endroit est prodigieux ! C'est prodigieux ! ». Son enthousiasme est adorable - quoique un peu exagéré.
On se perd dans le sens de la visite, il pleut de plus en plus fort. On s'abrite sous un arbre, on s'embrasse - Isaac est transi de froid. On attend que ça se calme, mais ça ne se calme pas. Alors on continue, on s'abrite quand on le peut. Je commence tout de même à en avoir marre : mes cheveux dégoulinent, mon pantalon est mouillé jusqu'aux genoux, je me demande soudain ce qu'on fout là plutôt qu'être au chaud dans un lit à faire l'amour.

On décide de rentrer - sauf qu'on se perd complètement. Je m'aperçois à ce moment là que j'ai suivi Isaac, faisant confiance à un sens de l'orientation dont il est manifestement aussi dénué que moi. On tourne en rond (même s'il affirme qu'on ne tourne pas vraiment en rond mais qu'on a fait une boucle), et on fini par retrouver notre chemin au bout d'une bonne heure. 
« J'ignorais que tu étais aussi mauvais en orientation », lui dis-je pour le taquiner. Il reste d'ailleurs étonnamment silencieux - monsieur n'a pas envie de montrer ses failles. 
Il fini par dire « oui, c'est une tare que j'ai ». 
Un silence. 
Puis : « J'en ai d'autres hein ! ». 
« Ah, mais c'est très bien ! Il en faut ! ». 
J'attends, mais évidemment il n'en dit pas plus. 
Je ris : « Je les découvrirais plus tard, alors... ».

On retourne au café où on a demandé notre chemin plus tôt, et on commande deux grands chocolats chauds, avec des crêpes. 
Il est 18h30.
Il propose de m'inviter au restaurant le soir - nous allons donc dans un restaurant très chic, après être passé en coup de vent chez moi pour se changer. « Je vais mettre une chemise, dit-il. Tu veux que je mette une chemise ? ». Je le trouve très beau quoiqu'il fasse - mais cette foutue chemise sera encore un calvaire à déboutonner quand arrivera enfin le moment où je pourrais le mettre nu.

Au restaurant, nous discutons de beaucoup de choses, et je me retrouve à me dévoiler encore. 
A un moment, sans trop de raisons, il s’enflamme : « Tu n'as pas assez d’exigences envers les gens ! Tu devrais en avoir plus ! Même vis à vis de moi ! Pose les limites ! Dis ce qui est négociable et non négociable ! ». 
Je le regarde comme s'il s'agissait d'un extraterrestre : cette conversation me semble déconnectée de la réalité, tant les limites sont posées depuis le début, et c'est la base de ce qu'on partage ! Que faudrait-il ajouter à cela ?!
Il me dit aussi qu'il pense que je suis plus résiliente que je ne semble le croire - oui, peut-être. On me le dit souvent.
Il revient sur le fait que je vois une psy - information lâché un peu maladroitement au café lorsqu'on s'est vu avec Copine#1 et son mec, et que j'aurais préféré taire. Il me dit qu'il n'y a pas de honte à cela - j'acquiesce, tout en avouant que comme souvent, ce que j'accepte chez les autres me semble inacceptable lorsque ça me concerne. Il veut savoir pourquoi j'ai commencé, quelle était la démarche - je dois donc bien avouer qu'il y a environ un an, je luttais contre une envie quasi permanente de mourir. 
Il est choqué. 
Il réalise qu'à notre première rencontre, c'était mon état d'esprit et je n'en laissais rien paraître.
Il me fait parler de moi, de mon histoire. Je me dévoile un peu, mais toujours avec réticence. J'ai toujours cette peur de lui donner les armes qui pourraient me blesser.

Nous repartons plus tard, il m'embrasse en sortant du restaurant, me serre contre lui. Nous rentrons, insouciants. Il pleut toujours. Un petit thé chaud, et puis on se brosse les dents, avant de nous déshabiller l'un l'autre, un peu dans la cuisine, un peu dans l'escalier, un peu dans le bureau, et puis je lui arrache son pantalon dans la chambre, et je dévore son corps de baisers. J'esquive ses bras qui tentent de finir de me déshabiller, et je le prends dans ma bouche, fougueuse. Je joue avec ma langue, avec ma bouche, je l'empêche de m'échapper, et je le sens bientôt se tordre sous moi - et gémir, et haleter, et perdre la tête. Il achève de me mettre nue, me caresse, me lèche. Il s'applique à couvrir mon corps d'attentions, il hérisse la pointe de mes seins du bout de ses doigts, puis de sa bouche. Je me tortille sous lui. Je sens qu'il veut absolument me faire jouir - et je sens d'instinct que ça va me bloquer. On fait l'amour longtemps, malheureusement son objectif fait perdre en spontanéité - et je ressens moins de choses. L'attente qu'il a de ma jouissance me bloque. On est épuisé, arrivant à peine à onduler l'un contre l'autre - quand il est terrassé par un long orgasme, qui le laisse exsangue sur moi. Je file aux toilettes. Ouch, c'était un peu trop long, je sens déjà que je vais souffrir les prochains jours - hello cystite !

On s'endort l'un contre l'autre, blotti sous la couette. Au matin, nous refaisons l'amour, une ou deux fois. C'est un plaisir de traîner au lit. Ses petits yeux du réveil sont adorables et il sourit. Il n'arrive pas à ouvrir l'emballage du préservatif, me le donne « Tiens, tu peux l'ouvrir ? ». Je regarde son corps dans la lumière du matin, je m'en gorge, je compare sa peau, très blanche à la mienne, et je regarde ses yeux, à la couleur indéfinissable - je disais vert, mais pourtant quand un rayon de soleil tombe dessus, ils sont presque jaunes - et je pense en moi même "hijo de la luna". Oui, il a des yeux couleurs olives.

Plus tard, nous allons à la boulangerie sous la pluie, puis petit déjeunons. Je reçois un appel de Copine#1, que je devais retrouver en fin d'après midi pour qu'elle m'accompagne sur le lieu du concours, qui est à 250km de là. Sauf qu'elle a eu un accident sur l'autoroute, sa voiture est explosée - bonne pour la casse, elle est encore choquée - mais indemne. Elle est coincée à 800km de là, et s'excuse de ne pas pouvoir m'accompagner. Moi je suis surtout rassurée de savoir qu'elle n'a rien.

Nous parlons longuement, encore. J'avais dit « On regardera un film ! », sauf qu'on parle. Parfois Isaac s'enflamme, parfois je ne suis pas d'accord avec lui. Parfois aussi, je ressens ce sentiment d'imposture qui m'a torturé il y a quelques temps - lorsqu'il dit « J'adore les universitaires, j'aurais aimé être en couple avec une universitaire. Bon, cela dit, c'est peut-être mieux que ça n'ai pas été le cas ». 
Et moi je me dis que je suis à mille lieux d'une universitaire, avec mon vague Bac +2. Je ne maîtrise ni la politique, ni l'histoire, ni la géo - les passions d'Isaac. Quand va-t-il s'apercevoir que je ne saisi rien de ces sujets ?! Et qu'il se sentira trahi d'avoir admiré une parfaite cancre ?

Nous sommes sur le canapé, petit plaid et chat sur les genoux, je regarde ses yeux, je perds le fil de la conversation, cette couleur est particulièrement extraordinaire... Et nous nous embrassons, nous commençons à nous déshabiller. « On reste ici ou on monte ? » demande-t-il. J'hésite. Finalement on monte. Il me lèche avec application, me caresse, les préliminaires durent longtemps et me font perdre la tête - je meures d'envie de le supplier de venir en moi, mais j'aime aussi tellement cette douce torture, que finalement je laisse se prolonger. La position l'excite terriblement - moi aussi - et il jouit très vite.
Après cela, je suis à deux doigts de l'orgasme - mais toujours ce blocage - et je suis une vraie furie. Je dévore sa peau, son corps, me couvre de ses mains, pendant qu'il rit. Mais nous sommes arrives au bout de ses capacités. Il finit par s'endormir - moi je lutte contre le sommeil : il est 17h, et je voulais partir pour ne pas rouler de nuit. Je reste tout de même une vingtaine de minute à le regarder dormir, à toucher sa peau, ses cheveux, le respirer. Puis je dois le réveiller : 
« Il faut qu'on bouge un peu. Mes affaires ne sont pas prêtes, et je ne voulais pas partir trop tard »
« Tu voulais partir à quelle heure ? »
« 17h »
On regarde l'heure : 17h26. 
C'est mort.

Je prépare mes affaires, lui demande conseil pour ma tenue, puis je cours un peu partout. Je fais un truc à manger en même temps, et on prend tout de même le temps de partager un repas. Il me donne quelques derniers conseils, sa voix est presque professionnel, presque tendue.

A 18h30, je décolle. On s'embrasse 
« Ceci est un bisou magique », dit il. 
« Toi ?! Toi, tu fais de la magie ? Et des bisous magiques ?! Ca alors ! »
« Oui, et mes bisous magiques sont d'une très grande efficacité ! ». 
Je ris.

Un dernier baiser, et je saute dans ma voiture. Ma chemise blanche sur la plage arrière, Metallica dans l'autoradio, le gps annonce 2h39 de trajet. 
Isaac a commencé à partir, puis s'est arrêté, est sorti de sa voiture, est revenu à pieds vers moi, qui commençait à partir. 
Il pleut. 
Il me regarde, de l'autre côté de la vitre, sans faire mine d'ouvrir la porte. 
Je descend la vitre. 
Silence. 
J'attends. 
Il fini par dire « Tu es prudente hein ? Tu fais attention ». 
Je souris « Oui, bien sûr ! ». 
Silence. 
Et puis : « Allez, fais bonne route »

Pendant tous le trajet, je me demande ce qui s'est passé - et ce qu'il voulait réellement me dire. 

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