jeudi 16 janvier 2020

Noël avec Isaac


Nous devions nous retrouver le 26 décembre, après nos échanges de mails un peu énervés, après avoir fêté noël dans nos familles (...et, le concernant, avec sa nana).

Des fêtes joyeuses de mon côté, quoique entachées des habituelles questions sur ma vie sentimentale. 
Toutefois, répondre : « Oh, ça va bien, je suis la maîtresse d'un directeur comptable et financier, on passe vraiment du bon temps ensemble, et sexuellement c'est incroyable ! », ça a le mérite de calmer rapidement le débat, et d'inciter à changer de sujet.
Mon tonton, 51 ans, galère depuis des années aussi et a décidé que 2020 serait sous le signe de Meetic. (On s'est soutenu).
La fin de soirée s'est achevé sur un débat glauquissime de mes grands-parents au sujet de qui décédera le premier (entre mon papy et ma mamie, mon connard d'oncle qui est mourant... Ou finalement n'importe lequel d'entre nous dans un accident bête) et qui veut quoi pour ses funérailles.
Bref, un sujet incontournable pour un noël réussi.

Pour en revenir à Isaac, je lui avais laissé le choix de venir ou non - mais de ne rien m'en dire. 
J'avais conclu mon message par « Je t'attendrai à 20h... Et si tu n'es pas là à 20h30, je comprendrai, et j'éteindrai le sapin ».
Je me suis préparée, la boule au ventre, me demandant si ça en valait la peine. J'ai mis mon costume de mère-noël (si si), mon bonnet, des bas et un porte-jarretelles.... Que j'ai finalement retirés parce que j'ai la taille trop fine et qu'il glisse et me tombe sur les chevilles - Pour l'effet sexy, c'est complètement raté.
Entre temps, Isaac est arrivé, il est entré, mais ma routine de noël c'est de jeter une poignée de paillettes à mes invités en criant « Joyeux noël ! » (mais dehors, sinon ça ruine ma cuisine), alors j'ai dévalé l'escalier en courant et en criant « Les paillettes ! Les paillettes ! ». Je me suis retrouvé face à lui. « Oh zut, les paillettes.... Bon tant pis ! » et je lui ai jeté une poignée de paillettes (dans les yeux) avant de remonter dare-dare finir de m'habiller, retirer mes bas (qui glissaient aussi), en soufflant « J'suis pas prête, j'suis pas prête ! ».
Isaac a patienté dans l'entrée en gloussant pendant que je courais partout et que j'allumais bougies et luminaires.
Lorsque je l'ai invité à entrer, il m'a sauté dessus, et j'ai bien cru qu'on allait faire l'amour directement contre mon frigo.

La soirée s'est difficilement mise en place, mais finalement la conversation est devenu fluide.

J'avais oublié mon faux-gras (le foie gras vegan) et ma charcut' végétale chez ma mère, mais notre soirée Mont d'Or, pomme de terre et pain abricot-noisette a suffit à nous remplir très correctement l'estomac : nous étions repu.
Puis nous avons échangé nos cadeaux. Je lui avais pris une BD qui m'avais beaucoup plu, et une place pour voir le Stabat Mater, qui est une pièce musicale qu'il aime tellement qu'il m'avait dit vouloir que ce soit joué à ses funérailles - lorsque j'ai vu que ce serait joué dans ma ville en 2020, j'ai sauté sur l'occasion. 
- C'est quelle version ?
- Comment ça ?
J'ai donc appris qu'il y a des tas de Stabat Mater, et qu'il aime celle de Pergolese. Je n'ai aucune idée de la version qui sera jouée - j'ignorais que des tas de pièces différentes pouvaient avoir le même nom : et bam, encore une occasion de constater le gouffre de mon inculture.
De son côté, il m'a offert une BD sur le Caravage, puis une affiche/photo de lui, qui était un peu la blague, pour cacher un séjour pour deux dans un hôtel-spa 4 étoiles, avec repas et massages. 
- Tu y vas avec qui tu veux...
Je lève les yeux au ciel :
- On ira ensemble, évidemment.

- Et, est que je peux jouer ?
- ... Du violon, tu veux dire ?
- Oui, évidement !
Heuuu... C'est à dire qu'il est 22h30, et que j'ai peur que mes voisins me détestent.
- C'est pour ton dernier cadeau : je veux te jouer un morceau que j'ai composé pour le groupe, et qui n'a pas de titre... Je voudrais que tu le nommes, et que tu trouves le nom qui te corresponde le mieux, qui est vraiment toi.
- Ah oui, il va falloir que je l'écoute pour ça...
- Il faut que je joue...
- Oui mais l'heure...
Quelle responsabilité ! Et quel drôle de cadeau - mais très bien trouvé, très original.
Mais comment trouver *le* mot qui me représente ? Y'en-a-t-il d'ailleurs un seul ?? Ou une multitude ?!

Et puis :
- Je peux te parler un peu ?
J'ai ri : 
- Ouh je déteste cette introduction !
Il a souhaité revenir sur nos messages.
Moi pas trop.
Mais il en avait besoin.
Bon.
Il a discuté avec sa mère - qui étonnamment, ne veut pas ma mort, et surtout, lui a simplifié la question par « Est-ce que tu veux continuer ta vie avec une personne maternante, ritualisante et sécurisante, dans une situation rationnelle et sans surprises, ou envisager ta vie sous le signe d'une passion amoureuse ? N'est-ce pas tout l’intérêt d'aimer quelqu'un ? ».
Il s'est étonné de découvrir cette facette fleurs bleue de sa personnalité.
Apparemment, elle me trouve très entière en amour.
Il abonde dans son sens : une vie sans passion, quel intérêt ?!
- Je sais que tu ne veux pas entendre du tout parler des points communs que tu as avec Victoria (je grogne en signe d'assentiment), mais tu en as... Tu as aussi beaucoup de différences. Et tu es tout sauf maternante. Mais pour autant, tout faire voler en éclat, comme ça, au bout de presque 4 mois, est-ce que ce n'est pas une folie ?!
Je tique à nouveau : 
- La question n'est pas de choisir une fille, ou de choisir une situation. La question, c'est ce que tu veux toi ! C'est la question de la vie que tu veux mener !
- En l’occurrence, c'est matérialisé par un choix entre Victoria et toi !
- Moui...
Il finit par m'expliquer, par de multiples circonvolutions, que si je lui demande de faire un choix tout de suite, il le fera. Mais qu'il préférerait prendre un peu plus de temps. Prendre le temps de poser nos sentiments respectifs - pour moi aussi, ce serait plus rassurant ! Que de toute façon, 2020 marquera forcément des choix qu'il devra faire dans sa vie. Il avance une durée de 6 mois - j'y ai réfléchis après coup, c'est vrai que 6 mois, c'est pas mal en fait. Ça m'irait bien. Pendant 6 mois, on ne parle plus d'avenir, plus de Victoria, plus de rien, et on fait le bilan en mai-juin ?! Ça serait un bon compromis.

Bref, je crois comprendre qu'au final, c'est à moi de fixer les règles : soit je lui impose un choix immédiatement, ce qu'il ferait si je lui demandais, car il refuse de me perdre, soit je laisse les choses se poser.
De mon point de vue, il faut surtout qu'on arrête de trop théoriser... Mais justement, nous laisser un temps de "répit", c'est peut-être une bonne solution ?
Il m'évoque le fait qu'il a été très énervé par ma comparaison de notre histoire avec celle de Miguel - j'ai admis que j'avais peut-être été un peu trop provoc' sur ce coup là... Néanmoins, l'analogie n'est pas entièrement fausse, loin de là.
Il me dit autre chose, qui me plait moyen : qu'il constate sans cesse dans mon regard une inquiétude, que je ne suis jamais vraiment totalement dans l'instant - sauf ces deux fois, où il m'a vu sourire sans fard, exprimant juste purement du bonheur. Je repense à l’Ostéopathe, qui me disait "Vous êtes toujours sur le qui-vive".
Je ne me serais laissé aller que deux fois avec Isaac ?! Le pire c'est que ça ne m'étonne pas tant que ça. Quel animal sauvage suis-je devenu ?!

Puis nous avons brossé nos dents - pour ma part, j'ai à peine réussi, tant il se collait à moi, me dévorait la nuque de baisers, et me caressait, son érection contre mes fesses. Je me suis retrouvé nue très vite, et j'ai foncé au premier.
Nous nous sommes jetés l'un sur l'autre assez rageusement, nous dévorant, affamés. Il me lèche, je le caresse, il me pénètre, il jouit presque aussitôt, et me caresse - je frôle l'orgasme, il est à ma portée, mais ça ne vient pas, il manque un petit rien... Mes doigts sont trempés, Isaac me dira au matin que nous avons eu un problème de capote.

Je dors très mal.
Et puis je me lève pour aller aux toilettes, et il me dit :
- J'ai mal au ventre...
Il a une petite voix toute penaude.
- J'ai mal, ça gargouille, j'ai chaud, ça ne va pas.
Ah mais en fait tu es absolument comme tous les hommes. Quand tu es malade, c'est l'agonie et la fin du monde !
- Mais non ! Je suis malade ! J'ai mal !
- Oui oui, ben c'est bien ça. Dors, et on verra demain comment tu vas.
Au matin, il ne va pas beaucoup mieux, et dors jusqu'à 10h.

Il décide de ne pas rentrer le vendredi soir chez Victoria, qu'on se voit encore un peu plus longtemps. Le fait qu'il était malade toute la nuit lui fournissant l'excuse toute trouvée. Lorsque je sors du boulot, j'ai un message de lui, me disant qu'il a quitté son boulot en début d'après-midi parce qu'il était trop mal, et qu'il a dormi de 16h à 19h. Je passe le chercher, l'emmène chez moi, et cuisine du riz pour nous deux (parce que s'il nous fait une gastro, vu comme on s'est galoché la veille, j'ai intérêt à faire gaffe). 

En fin de soirée, il est un peu plus ragaillardi.

Nous sommes assis dans le salon avec un thé, lorsque son téléphone sonne. C'est Victoria. Il s'arrête quelques secondes, et observe son écran, en pleine réflexion.
Gênée, je lui dis : « Heu... Tu peux prendre l'appel si tu veux. Va à l'étage, il n'y a pas de soucis... »
Il rit, m'embrasse, range son portable. Et on en parle plus.
Il ne rappellera pas Victoria de la soirée.
Personnellement, cet appel a jeté un froid pour moi. Je repense d'ailleurs à ce qu'il a dit la veille, au sujet de cette inquiétude que j'ai constamment dans le regard. Je prends un peu de recul, et m'observe : je réalise que je suis tendue, nerveuse, et plus que jamais sur le qui-vive.

Il est tôt, il me demande à nouveau s'il peut jouer.
Je le laisse jouer ce morceau qu'il a composé pour moi - au début j'avais compris qu'il s'agissait d'un morceau qui traînait, sans titre, et qu'il m'offrait de le baptiser, finalement il semblerait que ce soit une composition spéciale pour moi. C'est un morceau très long, où, m'explique-t-il, il y a trois ambiances différente, et un refrain spécifique. Une écoute ne suffit pas à me le mettre en tête, et certainement pas à lui trouver un nom. Je planche toujours sur cette recherche.
Mais j'aime assez ce morceau.
Il termine en jouant un bout de ce morceau que j'aime tant, et dont le titre est "Douleur". Mes poils se hérissent d'émotion.

Nous montons dans la chambre, nous discutons, nous caressons dans la douce lumière de mes lampes de chevet, entrecoupant nos éclats de rire par des vêtements que l'on enlève, des baisers que l'on parsème sur nos peaux nues, et des compliments enflammés que l'on se fait. « J'aime tellement tes seins ! Ils sont parfaits ! », dit-il avec emphase. 
Nous faisons l'amour tranquillement. Je monte et explose dans un inattendu orgasme vaginal, puis jouis encore par la suite sous ses doigts. Je l'observe ensuite, fascinée, manquer d'air, et aspirer de grandes goulées d’oxygène, avant d'expirer bruyamment, dans un long râle pendant qu'il s'éparpille dans un orgasme, qui fait passer de multiples émotions sur son visage.
J'ai posé des heures le lendemain matin, pour qu'on ai le temps de traîner au lit ensemble. Nous petit déjeunons, nous nous câlinons. Isaac est à fond, on parle sexualité, il redit qu'il adore mes seins, qu'il adore mes fesses. Me demande quels sont mes fantasmes. Je suis un peu prise de court. « Je crois que j'aimerais bien être attaché à ton lit » me dit-il. 
Je ris.
Je me demande comment la conversation en est arrivé là.  

Et puis je dois partir travailler.

J'ai le cœur gros car je sais que nous ne nous verrons pas pendant presque 10 jours. Il a une semaine de vacances, qu'il passe bien entendu avec Victoria. Ils fêteront Nouvel An ensemble, et moi je serais seule. Il me dit : « Tu peux m'écrire. Écris moi. Enfin, si tu veux. Mais tu peux. Fais-le ! »
Oui, mais pourra-t-il me répondre ?
Je me dis que passer tant de temps avec Victoria va encore le mener à changer d'avis, et que sa diatribe sur la passion amoureuse sera relégué aux oubliettes. 
Que ce superbe noël, et ses cadeaux incroyables, n'étaient juste qu'une bulle éphémère.

Ces dix jours vont être longs.

Aucun commentaire:

Enregistrer un commentaire